Anne de Montmorency, né à Chantilly le 15 mars 1493 et mort à Paris le 12 novembre 1567, est connétable, duc et pair de France, maréchal puis grand maître de France. Cet homme extrêmement puissant, qui symbolise la Renaissance française, est un ami intime des rois François premier et Henri 2.
Biographie
Son père Guillaume de Montmorency (vers 1453-1531) est général des finances et gouverneur de plusieurs châteaux royaux. Il accompagne le roi Charles 8 dans la première expédition d'Italie. La maison de Montmorency est déjà à ce moment l'une des plus puissantes du Royaume : elle possède des terres très étendues, de nombreux fiefs et se trouve très proche de la famille royale. Il hérite par sa mère, Anne Pot, du château de la Rochepot, dans le sud de la Côte d'Or.
Anne est le filleul de la reine Anne de Bretagne, qui lui donne son prénom (Anne était un prénom épicène à cette époque). Il est élevé au château d'Amboise avec le futur roi de France François premier. C'est pourquoi il est très proche du roi. François premier se montrera très attentif aux conseils d'Anne de Montmorency, à la fois militaire couronné de succès et grand esthète, même s'ils connaîtront des différends.
Il participe à plusieurs batailles dont celles de Ravenne (1512) et Marignan (1515). Ses qualités militaires sont révélées par la défense de Mézières (1521), qu'il dirige avec Bayard, et par la prise de Novare (1522), qui le fait maréchal de France.
Prisonnier à Pavie en 1525 avec le roi, il est libéré contre rançon et se retrouve négociateur dans le traité de Madrid (1526) qui met fin à la première guerre de François premier et de Charles Quint.
En guise de remerciements, le roi lui offre le château de Fère-en-Tardenois lors de ses noces avec Madeleine de Savoie, fille de René de Savoie et d'Anne Lascaris, et cousine du roi. Anne de Montmorency est alors nommé grand maître de France et gouverneur du Languedoc, ce qui renforce encore sa puissance au sein du Royaume de France.
En 1532, il est reçu dans l'ordre anglais de la Jarretière, un des rares cas autres que celui de certains rois ou empereurs français,.
En 1536, Anne de Montmorency organise la défense de la Provence contre Charles Quint, ce qui lui vaut la charge de connétable de France en 1538. La fonction de connétable de France était alors la plus haute distinction : son porteur avait la charge du commandement général des armées en l'absence du roi. En tout lieu, le connétable représente le roi et porte son épée.
Anne de Montmorency profite de son crédit auprès du roi pour amener les entrevues de François premier à Nice avec le pape Paul 3 et à Aigues-Mortes avec l'empereur. Malgré ses nombreux succès militaires, Anne de Montmorency défend la paix. Cette position le fait entrer en conflit avec Anne de Pisseleu, favorite du roi. Lorsque François premier renonce à cette politique pacifique en 1541, Anne de Montmorency tombe en disgrâce. Le conflit politique avec le parti de la favorite se double d'une animosité privée qui renforce la haine d'Anne de Pisseleu. En effet, le connétable, qui a la réputation d'être pudibond, volontiers moralisateur, avait eu une liaison, brève, intense, mais sans doute honteuse avec une dame de la suite d'Anne de Pisseleu : Mademoiselle de Saint-Gilles. De cette liaison était née une fille, Anne (1539-1570), que le connétable refusa de reconnaître. Depuis lors Anne de Pisseleu œuvrait à la disgrâce d'Anne de Montmorency,. La disgrâce du Connétable survient brutalement en 1541, lorsque, alors qu'il avait persuadé le roi que Charles Quint lui rétrocéderait le Milanais, il apparaît que celui-ci en fait don à son fils, l'infant Philippe. Jusqu'à la mort de François premier, le 31 mars 1547, le Connétable ne reparaîtra plus à la cour.
Henri 2 qui succède à François premier, appelle le connétable son compère (Anne de Montmorency était pour ainsi dire un père pour lui, tant il avait été proche de François premier). Henri 2 lui rend toute sa puissance, partagée toutefois avec les Guise. L'affrontement entre les Guise et les Montmorency ne fera que s'aggraver au cours du règne d'Henri 2. Anne de Montmorency réprime durement la révolte de Bordeaux due à la tentative d'application de la gabelle, l'impôt sur le sel : malgré la reddition de la ville, il fait exécuter cent bourgeois et magistrats. Il ne peut empêcher les Guise de provoquer une rupture, avec Charles Quint, puis avec Philippe 2. Dans la première lutte, il occupe Metz au début du « Voyage d'Allemagne ».
Dans la seconde lutte, vaincu par le duc Emmanuel-Philibert de Savoie, commandant en chef de l'armée impériale du roi d'Espagne, Philippe 2 à la bataille de Saint-Quentin en 1557, il est fait prisonnier : pour obtenir sa libération, il contribue beaucoup à la signature des traités de paix du Cateau-Cambrésis les 2 et 3 avril 1559 qui mirent un terme au conflit entre la France d'un côté l'Espagne, les États de Savoie et l'Angleterre de l'autre.
À partir de 1551, il tient également la charge de gouverneur de Caen.
Pendant les guerres de religion, il forme un « triumvirat » catholique avec le duc de Guise et Saint-André. Pris à Dreux (1562), il se rapproche après la paix de son neveu protestant, Coligny, ayant contribué à la signature de la paix d'Amboise (1563). Même au plus fort des guerres de religion, et investi militairement du côté catholique, il sauvera de l'exécution plusieurs artistes protestants en obtenant leur grâce auprès du Roi.
Montmorency dirige par la suite le siège du Havre (1562-1563) contre les Anglais, mais repousse toute intervention aux Pays-Bas.
Lors de la seconde bataille de Saint-Denis (1567), encerclé, blessé au visage, il refuse de se rendre. Il est alors mortellement blessé d'un coup de pistolet dans le dos par un certain Robert Stuart.
Mécénat
Créé duc et pair en 1551, Anne de Montmorency était devenu un des plus puissants seigneurs de France, possédant près de 600 fiefs, aimant les arts et protégeant Bernard Palissy ainsi que Jean Bullant, l'architecte de ses deux châteaux de Chantilly et d'Écouen. Ce château d'Écouen peut lui-même symboliser l'homme que fut Anne de Montmorency : à la fois forteresse stratégique et imposante, mais aussi palais des arts inspirés des plus grandes œuvres architecturales d'Italie.
Anne de Montmorency fait rénover le château médiéval de Chantilly, légué en 1484 par Pierre 3 d'Orgemont (arrière-petit-fils de Pierre d'Orgemont, chancelier de France), sans enfant, à son neveu Guillaume de Montmorency. Grand esthète et collectionneur d'art, Anne de Montmorency prête, tout comme François premier, une grande attention au renouveau des arts à la Renaissance. Il sera d'ailleurs le financeur et le protecteur d'un grand nombre d'artistes célèbres de l'époque, tel que Bernard Palissy. Il intervient plusieurs fois, en tant que mécène, pour sauvegarder des édifices précieux menacés de s'effondrer par manque d'entretien.
Anne de Montmorency fait surtout élever le château d'Écouen, sa demeure principale et monumentale à flanc de colline. Passionné d'art, il emploie pour cela certains des plus grands sculpteurs de toute l'Europe, ainsi que des céramistes, des peintres et des architectes. L'architecte principal d'Écouen est Jean Bullant, qui participera plus tard à l'édification du palais des Tuileries. Le jeune sculpteur Jean Goujon trouvera la célébrité par les œuvres qu'il réalisera pour le château d'Écouen à la demande du duc de Montmorency. Pour orner sa demeure, Anne de Montmorency fait encore venir de toute l'Europe certains des objets les plus raffinés de la Renaissance. Une fois achevé, ce château devient sa résidence principale.
Sous le règne de Henri 2 (1547-1559), dont Anne de Montmorency est le mentor, le connétable fait la connaissance de Philibert Delorme qui travaille pour le roi dans les châteaux de Saint-Maur, Anet et Meudon. Delorme est devenu un architecte influent, comblé d'honneurs. Anne de Montmorency lui commande la rénovation du château de Fère-en-Tardenois. Là Delorme rénove la porte d'entrée du château, les logis, et fait édifier un pont-galerie. En 1557 les travaux ne sont pas achevés, Delorme tombant en disgrâce. Le château de Fère-en-Tardenois avait accueilli à de fréquentes reprises François premier pour des parties de chasse dans le parc du château. Après la rénovation, Henri 2 séjourne au château de Fère-en-Tardenois avec sa maîtresse de l'époque, Nicole de Savigny, baronne de Fontette.
Ascendance
Ancêtres d'Anne de Montmorency
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32. Jean premier de Montmorency
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16. Charles premier de Montmorency
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33. Jeanne de Calletot
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8. Jacques de Montmorency
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34. Adam de Villers de L'Isle-Adam
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17. Perronnelle de Villers de L'Isle-Adam
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35. Alix de Méry
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4. Jean 2 de Montmorency
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36. Jean premier de Melun
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18. Hugues premier de Melun
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37. Isabelle d'Antoing
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9. Philippe de Melun
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19. Béatrix de Beaussart
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2. Guillaume de Montmorency
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10. Pierre d'Orgemont
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5. Marguerite d'Orgemont
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22. Guillaume 7 Paynel
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11. Jacqueline Paynel
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23. Jeanne
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1. Anne de Montmorency
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24. Guillaume Pot
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12. Régnier Pot
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50. Guy 4 de La Trémoille
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25. Blanche de La Trémoille
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6. Guy Pot
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13. Radegonde Guenand
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3. Anne Pot
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56. Pierre 2 de Villiers
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28. Jean de Villiers de L'Isle-Adam
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14. Jacques de Villiers de L'Isle-Adam
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29. Jeanne de Vallengoujart
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7. Marie de Villiers de L'Isle Adam
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15. Jeanne de Clermont
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Enfants
De son épouse Madeleine de Savoie-Tende, Anne de Montmorency a douze enfants :
- François (1530-1579), l'aîné, qui lui succède. Deuxième duc, Grand-maître, maréchal, gouverneur d'Ile-de-France, gendre du roi Henri 2, Mort sans postérité survivante ;
- Henri (1534-1614), qui remplace son frère aîné, Troisième duc, maréchal, connétable, gouverneur du Languedoc :
- père, par sa Deuxième femme Louise de Budos, du Quatrième et dernier duc de Montmorency, le maréchal Henri 2 (1595-décapité en 1632 ; sans postérité), et de Charlotte-Marguerite de Montmorency, princesse de Condé (mère du Grand Condé),
- par sa Première épouse, Antoinette de La Marck (petite-fille de Diane de Poitiers ; arrière-arrière-petite-fille de Charles 7 et d'Agnès Sorel), il est le père de Marguerite (x son cousin germain Anne de Lévis-Ventadour ci-dessous), et de Charlotte de Montmorency (bru de Charles 9 par son union avec Charles, duc d'Angoulême) ;
- Charles (1537-1612), seigneur de Méru, puis baron, puis duc de Damville et pair de France, amiral (mort en 1612 sans postérité) ;
- Gabriel, baron de Montbéron, né en 1541-tué à la bataille de Dreux en 1562 ;
- Guillaume (vers 1547-1594), seigneur de Thoré et de Dangu, marié à Léonore d'Humières, puis à Anne de Lalaing, d'où du Deuxième lit :
- Madeleine de Montmorency (1582-1615), mariée le 19 juin 1597 avec Henri de Luxembourg-Brienne (confer (reportez-vous à/comparez avec) l'article Antoine), duc de Piney, d'où la suite des ducs de Piney-Luxembourg en succession féminine (les Montmorency-Bouteville-Luxembourg, dont François-Henri) ;
- Éléonore, † vers 1557, mariée en 1545 à François 3 de La Tour d'Auvergne :
- leur fils est Henri de La Tour d'Auvergne duc de Bouillon, père du maréchal de Turenne ;
- Jeanne, † 1596, mariée en 1549 à Louis 3 de La Trémoille, duc de Thouars : d'où la suite des La Trémoïlle, ducs de Thouars, comtes de Laval, princes de Talmont,
- et Charlotte-Catherine de La Trémoille, princesse de Condé (son fils est Henri 2 de Condé, et son petit-fils est le Grand Condé) ;
- Catherine (1532-1624), mariée en 1553 à Gilbert 3 de Lévis, d'où la suite des ducs de Lévis-Ventadour par leur fils Anne ;
- Marie, mariée en 1567 à Henri de Foix-Candale, d'où Marguerite de Foix qui épouse en 1587 le duc d'Épernon ;
- Anne († 1588), abbesse de la Trinité de Caen ;
- Louise, abbesse de Gercy ;
- Madeleine (morte en 1598), abbesse de Caen après sa sœur Anne.
Deux de ses arrière-petits-fils sont d'éminents chefs militaires : le maréchal de Turenne (1611-1675) et le Grand Condé (1621-1686).
Ronsard, dans Les Hymnes, (Hymne de Henri 2, v. 442), le cite parmi les « Mars » qui sont au service d'Henri 2.
Il a une enfant illégitime :
- Anne (1539-1570), fille de Mademoiselle de Saint-Gilles.
Postérité
Une statue du duc sculptée par Paul Dubois en 1886 est présente sur l'esplanade du château de Chantilly.
Chaque année, la commune d'Écouen organise une grande fête au mois de mai, appelée le « festival du Connétable » en l'honneur d'Anne de Montmorency. La dernière édition (mai 2015) a attiré plus de 7 000 visiteurs.
Paul Delon interprète Anne de Montmorency dans Francois premier de Christian-Jaque en 1937.