Collorec [kɔlɔʁɛk] est une commune du département du Finistère, dans la région Bretagne, en France. Elle fait partie traditionnellement du Pays Dardoup.
Histoire
Étymologie et origines
Le nom « Collorec » proviendrait d'un mot breton kolorenn signifiant "noix de terre". Une petite plante quasiment inconnue à l'époque actuelle peut aussi donner un nom de commune : ainsi, la noix de terre, dite encore keler en breton, mot qui provient du gallois cylor, attesté en moyen-breton sous la forme colorenn et représenté aujourd'hui par le pluriel keler, et gernotte en gallo, explique le nom de Collorec. Le nom de la paroisse s'est écrit Choloroc avant 1108.
Collorec a d'abord fait partie, au sein de l'Armorique, de la paroisse primitive de Plouyé, avant de devenir une trève de Plonévez-du-Faou, dépendant de l'évêché de Cornouaille. Peu après sa transformation en commune en 1790, Collorec est amputée du terroir du Granec, attribué à Landeleau.
Antiquité et Moyen Âge
On a retrouvé à Collorec plusieurs tumuli et souterrains datant de l'âge du fer. Une cachette contenant 13 haches à talon a été découverte en 1883 et 4 autres, ainsi que 4 anneaux de bronze (bracelets ?) en 1889, dans les deux cas par Armand René du Châtellier.
L'ancienne voie romaine, devenue le chemin dénommé Hent-Ahès au Moyen Âge « venant de Carhaix passait par Plouguer, Le Pénity en Landeleau, le Respidal en Collorec, 400 mètre au sud du Cloître, 2 800 mètre au nord de Pleyben, la chapelle de Lopars en Châteaulin, Dinéault, 2 400 mètre au sud d'Argol, Crozon et la chaussée de l'anse du Kerloc'h pour parvenir à Camaret ».
Trois mottes féodales témoignent de l'existence d'anciens châteaux ou manoirs à Roudoumeur, Ster-ar-park (la seule à être partiellement conservée) et, commune de Landeleau désormais, au Granec. Les manoirs du Granec (voir Landeleau), du Cleuziou et de Roudoumeur furent à la tête de puissantes seigneuries.
La « boutade » de 1590 et les guerres de la Ligue
En septembre 1590, les ligueurs commandés par La Tremblaye s'emparent par surprise de Carhaix, la ville étant mal gardée en raison d'un mariage survenu la veille à l'occasion duquel tout le monde avait festoyé. Beaucoup d'habitants de la ville furent tués, d'autres trouvant leur salut dans la fuite en pleine nuit, et la ville fut pillée. Le bruit de cet événement se répandit dans toute la contrée, le tocsin sonna dans les églises. Les paysans accourus de Plouyé, Plounévez, Landeleau, Cléden, Huelgoat et paroisses voisines s'acheminèrent sans ordre ni discipline vers Carhaix, y compris le sieur du Cleuziou Roudoumeur, en criant « Marou ! Marou Desh ! » (Mort ! Mort à eux !). Arrivés au Granec [en Landeleau] , Coatanezre, le sieur de Prat-Maria, seigneur du Granec, refuse de marcher à leur tête, mais leur propose comme chef un vieux soldat nommé Lanridon. « Il ne savait pas [...] qu'entreprendre de régler les esprits scabreux et mutins, c'est mener paistre une troupe de renards et se charger de les ramener tous les soirs à l'étable ». Parvenus au pont du Moulin du Duc, ils élèvent une barricade mais, indisciplinés, sont écrasés. « Il y eut en cette déroute un grand massacre de rustiques [» écrit le chanoine Moreau. Lanridon, trouvé parmi les morts, fut enterré le lendemain à Collorec par le chanoine Moreau qui habitait alors au château du Granec.
Le lendemain de cette bataille, des paysans accourus de paroisses plus éloignées comme Pleyben, Loqueffret, Brasparts, Spézet, accourent à leur tour, commandés par le sieur du Bizit et le prêtre Linlouët (de Pleyben tous les deux), attaquent les « royaux » sans attendre les renforts devant arriver de Châteauneuf, Gouézec et Briec ; ils réussissent un moment à entrer dans Carhaix, mais des renforts dirigés par le sieur du Liscouet, de Tréguier, permirent aux « royaux » de renverser la situation et les paysans furent presque tous exterminés, y compris leurs deux chefs. Cette « boutade » (= révolte, jacquerie) de paysans fut donc pour ces derniers un terrible échec. Le seigneur du Liscoët, furieux d'avoir été blessé (sa main droite avait été coupée d'un coup de hache) mit le feu à la ville de Carhaix et « l'incendie dévora ce que le feu avait épargné ». La Tremblaye envisage de venir en représailles attaquer le château du Granec : « Nous y trouverons honneur et profit ; la garnison ne saurait nous résister ; nous emporterons un butin considérable » disait-il, mais du Liscoët l'en dissuada : « La garnison est trop nombreuse et dirigée par un habile capitaine ». Il fit aussi valoir que le château était très fort, entouré de larges et profonds fossés, flanqués de quatre tourelles munies de canons. Le château du Granec ne fut pas alors attaqué alors que « l'ennemi n'aurait eu qu'à se présenter pour s'en rendre maître. Il restait à peine six hommes de garnison. »
Contre Guy Éder de La Fontenelle, le « brigand de Cornouaille »
« À trois lieues vers l'Occident, en la trève de Collorec » se trouvait le Granec. Elle était ceinte d'un bon fossé « et de levées de terre par dedans, flanquée de quatre tourelles aux quatre coins de l'enclos ». Le château possédait même, toujours aux dires du chanoine Moreau, « une tour de pierre de dix étages [sic] », sur laquelle « il y avoit cinq ou six pièces de canons en fonte verte .» La place avait déjà les années précédentes été assiégée à plusieurs reprises par des « royaux » (royalistes) car le seigneur du lieu, Vincent de Cotanezre, seigneur de Pratmaria, appartenait à la Ligue.
En juin 1593, une ruse permit au « brigand de Cornouaille », La Fontenelle, qui fit croire au seigneur du Granec que c'était le gouverneur de Morlaix qui lui envoyait des troupes pour l'épauler dans la défense de son château, de s'emparer sans combattre du château, faisant prisonnier le seigneur et ses hommes dans la grande tour. Mais quelques jours plus tard, en juillet 1593 semble-t-il, plus d'un millier de paysans de Plouyé et des paroisses avoisinantes (Landeleau, Loqueffret, Collorec, Plonévez-du-Faou, Huelgoat...), profitant de l'absence du bandit parti guerroyer du côté de Morlaix, firent le siège pendant huit jours, mais La Fontenelle disposait de troupes mieux armées qui prirent les paysans par surprise, de nuit. 800 paysans furent ainsi massacrés par les sbires de La Fontenelle aux abords du château du Granec. Ce fut un carnage affreux et La Fontenelle, toujours selon le chanoine Moreau, ne permit pas « que les parents des décédés vinssent quérir leurs corps et qu'ils reconnussent leurs morts et les faisait garder de nuit pour empêcher de leur rendre les derniers devoirs et, par ainsi, demeurèrent corrompre sur la face de la terre ». Le chanoine ajoute : « c'était une grande compassion de voir ces pauvres rustiques ainsi massacrés qui pourrirent et furent mangés par des chiens et la nuit des loups ; car si aucun des parents ne venait la nuit pour enlever un mort, il était tué sur le champ. »
La Fontenelle renforça la défense du Granec « établissant des plates-formes de terre en y mettant des troncs d'arbres de long et de travers », en faisant une place « qui pouvait résister même au canon », continuant à écumer le Poher et une bonne partie de la Cornouaille.
Le manoir de Trefflec'h, qui appartenait à l'époque à la famille de Keramanach, dépendait de la seigneurie du Granec et fut détruit, en même temps que le château du Granec, en 1594, par le duc de Mercœur, chef de la Ligue et gouverneur de Bretagne, en représailles contre Guy Éder de La Fontenelle, le « brigand de Cornouaille », qui les possédait et écumait la région. D'autres chefs de bandes écumèrent la région à la même époque, comme de Liscoët et Anne de Sanzay de la Magnane.
Révolution française
Jacques Lallouette, un prêtre originaire de Cléden-Poher, refusant de prêter le serment de fidélité à la Constitution civile du clergé et devint donc prêtre réfractaire, disant la messe clandestinement dans une maison du hameau de Penarquinquis. Les gendarmes tentèrent de l'arrêter le 10 février 1790 : « Nous, Rochet, Damy et Cheriner, gendarmes de Châteauneuf, nous étant transportés à Collorec pour y capturer le sieur Lallouette, prêtre réfractaire qui depuis longtemps est caché par les habitants de cette trève. Nous arrivâmes au bourg vers 10 heures, où entrant, nous aperçûmes plus de trois cents personnes qui attendaient le sieur Lallouette pour y entendre la messe ». Les gendarmes sont menacés et demandent la protection de la municipalité. « Nous entendions dire de toute part : "Foutons-leur sur le dos, ils ne sont que quatre". [...] Peu après, nous entendîmes sonner le tocsin, mais cela ne nous effraya pas. » Peu après, le maire, trois officiers municipaux et le procureur de la commune, tous décorés de leur écharpe, vinrent demander aux gendarmes de voir leur ordre écrit et, ensuite, leur demandèrent de se retirer sans arrêter le prêtre, ce que firent les gendarmes. Jacques Lallouette devint recteur de Collorec en 1802, puis de Kergloff. Il mourut en 1822.
François Le Coz, né à Collorec, recteur de Poullaouen, fut condamné à mort et exécuté à Brest le 24 mars 1794. Il fut probablement le premier prêtre réfractaire guillotiné à Brest.
Le 19ᵉ siècle
Selon Marteville et Varin, continuateurs d'Ogée, en 1843, pour une superficie communale totale de 2 839 hectare, les terres labourables occupaient 1 272 hectare, les prés et pâturages 261 hectare, les landes et incultes 1 020 hectare, les bois 113 hectare, les vergers et jardins 59 hectare. À l'époque, la commune possédait 6 moulins à Keroc'h, Roudoumeur, le Cleuziou, le Parc, Kervaro, Grand-Moulin et à eau. Les mêmes auteurs écrivent qu'à l'époque le froment est peu cultivé dans la commune, que les bois de chênes et de hêtres, peu étendus, fournissent un peu de bois de charpente, que les voies de communications sont peu nombreuses et en mauvais état, particulièrement les ponts, y compris le chemin de grande communication allant de Châteauneuf au Huelgoat. Ils signalent aussi trois foires, l'une le vendredi après le dimanche de la Trinité, les deux autres les lundis après le troisième dimanche de juillet et d'octobre, qui ne sont toutefois légalisées par le Conseil général du Finistère qu'en 1865. En 1890, sept foires sont organisées les Troisième lundi de mars, avril, mai, juillet, octobre et novembre ainsi que le vendredi suivant le dimanche de la Trinité.
En 1867, le chemin allant de Collorec à Port-Launay est classé dans la voirie départementale (chemin de grande communication) à la demande des communes de Collorec, Plonévez-du-Faou, Le Cloître, Pleyben et Brasparts : « aussi ces communes vont-elles vendre leurs produits au Port-Launay et y puiser leurs calcaires ». Les travaux d'aménagement de cet itinéraire ont lieu les années suivantes jusqu'en 1878 au moins, année où des crédits importants sont encore votés par le Conseil général.
En 1873, Collorec demande la création d'un établissement des postes dans la commune, mais elle n'en dispose toujours pas en 1914.
Un rapport du Conseil général du Finistère indique en août 1880 que Collorec fait partie des 27 communes de plus de 500 habitants du Finistère qui n'ont encore aucune école de filles.
Le 20ᵉ siècle
La Première Guerre mondiale
Le monument aux morts de Collorec porte les noms de 89 soldats morts pour la France pendant la Première Guerre mondiale ; parmi eux, deux au moins (Pierre Autret et Jean Lochou) sont des marins morts en mer ; cinq au moins (Yves Cochennec, Jean Diraison, Jean Faucheur, Yves Sizun, Pierre Toux) sont morts en Belgique ; un (Joseph Riou) est mort en Macédoine dans le cadre de l'expédition de Salonique ; la plupart des autres sont morts sur le sol français dont Corentin Masson qui reçut la Médaille militaire.
La Seconde Guerre mondiale
Le monument aux morts de Collorec porte les noms de 14 personnes mortes pour la France pendant la Seconde Guerre mondiale.
L'après Seconde Guerre mondiale
Un soldat originaire de Collorec (Corentin Derrien) est mort pendant la guerre d'Indochine et trois (François Barazer, Jean Guichoux, J. Sizun) pendant la guerre d'Algérie.
Jean Nédélec, instituteur et ancien résistant, créa l'« Amicale laïque de Collorec » lorsqu'il était directeur d'école à Collorec après la Seconde Guerre mondiale. C'est à Collorec que ce militant laïque et adhérent du parti communiste a écrit ses Mémoires sous le titre « 1920-1980 : 60 ans de vie militante dans le Finistère ».
Activités associatives, culturelles, festives et sportives
Tous les lundis s'y déroule un marché communal où se vendent des produits divers de la région.
Lieux et monuments
- L'église Notre-Dame : construite par les architectes Joseph Bigot et Armand Gassis, elle date de 1894, seule sa façade occidentale date du 18ᵉ siècle, l'église de cette époque remplaçant une église antérieure du 16ᵉ siècle. Son clocher à dôme date de 1836. Des groupes statuaires du 14ᵉ siècle (Vierge-Mère à l'oiseau) et du 16ᵉ siècle (sainte Anne et une Descente de croix) s'y trouvent, ainsi qu'une statue de saint Herbot.
- La chapelle Sainte-Marguerite, située à Trefflech, date de 1874 (mais elle a remplacé une chapelle antérieure) et est en forme de croix latine ; elle possède des statues anciennes de sainte Marguerite (représentée assise sur deux dragons), saint Louis (portant la couronne d'épines), sainte Catherine et saint Sébastien. Le pardon de Sainte-Marguerite a lieu le Troisième dimanche de juillet.
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Sainte-Marguerite, une sainte guérisseuse : cette sainte était invoquée par les femmes enceintes ou craignant d'être stériles. Les femmes qui venaient invoquer la sainte à la chapelle devaient se conformer à certains rites : celles qui craignaient d'être stériles devaient faire trois fois le tour de la chapelle par l'extérieur et à chaque tour, elles entraient se frotter le ventre à une pierre alors dressée entre le chœur et la nef (désormais placée à l'extérieur, à droite de la porte d'entrée) ; c'est une pierre de section carrée avec à son sommet une petite cuvette qui servait de bénitier). A celles qui étaient enceintes, on lisait le Livre de sainte Marguerite. Enfin, on plaçait le livre ainsi qu'une ceinture de sainte Marguerite censée faciliter l'accouchement, sur le ventre des parturientes.
« Les femmes pour devenir fécondes font trois fois le tour de la chapelle Sainte-Marguerite à Collorec, avant et après le coucher du soleil ; à chaque tour, elles rentrent dans le sanctuaire pour réciter cinq Pater et cinq Ave ; cela fait, elles touchent à la statue de la sainte le nombril mis à nu, se confessent et déposent une offrande ».
- La chapelle Saint-Guénolé date de 1512 si l'on en croit une date indiquée sur l'une de ses poutres mais a été restaurée en 1682 et en 1809 ; elle possède de nombreuses statues polychromes dont deux de saint Guénolé (l'une le représentant en abbé, l'autre en simple moine) et une de Notre-Dame-de-Bonne-Nouvelle. C'est l'ancienne chapelle privée des seigneurs du manoir du Cleuziou. Certaines sablières sont décorées de têtes de femmes joufflues portant des coiffes du pays. Le vitrail est une création du maître-verrier quimpérois Le Bihan. Son pardon a lieu le premier dimanche de septembre. Il était invoqué pour guérir les maux de ventre et les névralgies, mais aussi si un temps pluvieux menaçait les récoltes.
- La commune possède 5 calvaires : celui de Kergoz est le plus ancien, datant du 14ᵉ siècle. Un autre calvaire situé dans le bourg, près de la mairie, date de 1458, celui de Sainte-Marguerite à Trefflech de 1562. Le calvaire du cimetière, édifié par Larhantec, date de 1868 et possède un groupe statuaire de Notre-Dame-de-Pitié. Le calvaire de Kerandoaré, du 16ᵉ siècle, porte un crucifix et une Vierge à l'Enfant.
- La fontaine Sainte-Barbe, située à Quein Goualc'h au pied de la motte féodale de Ster-ar-park, en granite et moellons, était à proximité de l'ancienne chapelle Sainte-Barbe disparue. Son pardon continue pourtant à être célébré le premier dimanche de mai. La fontaine dans son état actuel date du 19ᵉ siècle et a été restaurée au 20ᵉ siècle. L'ancienne statue de sainte Barbe qui l'ornait, en bois polychrome et datée du 16ᵉ siècle, se trouve désormais dans l'église paroissiale. Elle a été remplacée par une statue plus récente, œuvre d'un sculpteur de Châteauneuf-du-Faou, Marcel Théotec.
- Des manoirs à Trefflec'h (le manoir datait du 16ᵉ siècle, mais il ne subsiste qu'un bâtiment du 17ᵉ siècle) et au Rest (datant du 17ᵉ siècle).
- L'ancien presbytère a été transformé en mairie et agence postale, avec des logements sociaux à l'étage.