Le Grand Palais est un monument parisien situé en bordure des Champs-Élysées, face au Petit Palais, dont il est séparé par l'avenue Winston-Churchill, dans le Huitième arrondissement. Ses 77 000 mètre carré abritent régulièrement salons et expositions.
Historique
Le « Grand Palais des Beaux-Arts » est édifié à Paris à partir de 1897, pour l'exposition universelle prévue du 15 avril au 12 novembre 1900, en lieu et place du vaste mais inconfortable palais de l'Industrie de 1855. « Monument consacré par la République à la gloire de l'art français », comme l'indique le fronton de l'aile ouest (palais d'Antin), sa vocation originelle consiste à accueillir les grandes manifestations artistiques officielles de la capitale.
Dans les années 1960, Le Corbusier souhaite la démolition du Grand Palais pour y implanter à la place le musée d'Art du 20ᵉ siècle dont André Malraux lui a confié la réalisation. La mort de l'architecte, le 27 août 1965, met fin au projet.
Par arrêté du 12 juin 1975, la nef est classée au titre des monuments historiques. Un nouvel arrêté du 6 novembre 2000, protège le Grand Palais dans sa totalité.
Le concours d'idées
L'établissement d'un programme est rédigé et l'organisation d'un concours d'idées entre architectes est décidée par arrêté du 22 avril 1896. Contrairement à ce qui avait été prévu pour le palais du Trocadéro ou encore l'opéra Garnier, il n'est pas envisagé que la compétition soit internationale. Le concours ne s'adresse, ici, qu'aux seuls architectes de nationalité française.
Les architectes lauréats
Après une suite d'épreuves très disputées, de péripéties et un âpre débat au sein des représentants des autorités, de la presse et du grand public, les architectes Henri Deglane, Albert Louvet, Albert-Félix-Théophile Thomas et Charles Girault ne peuvent être départagés et sont choisis pour réaliser une synthèse de leurs propositions respectives et faire œuvre commune.
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La répartition des tâches
- Henri Deglane est chargé des nefs nord et sud de la grande nef et de sa partie transversale dénommée « paddock », des façades et décors qui l'entourent et plus particulièrement de l'entrée principale et des péristyles situés de part et d'autre, sur la nouvelle « avenue Alexandre-III », actuelle avenue Winston-Churchill.
- Albert Louvet, auteur du plan, se voit confier la responsabilité d'édifier la partie centrale dont le Salon d'honneur et, en coordination avec Deglane, le grand escalier d'honneur et le décor peint et sculpté du mur de fond de la nef transversale.
- Albert Thomas doit mener à bien la construction de l'aile ouest, dite palais d'Antin et des élévations correspondantes sur l'avenue d'Antin (future « avenue Victor-Emmanuel-III », aujourd'hui avenue Franklin-D.-Roosevelt).
- Quant à Charles Girault, il est désigné pour la mise au point définitive des plans et la coordination générale des travaux. Il doit assurer, en même temps, la maîtrise d'œuvre du Petit Palais (actuel musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris) dont il est le concepteur.
Le constructeur est l'entreprise Daydé & Pillé.
Analyse du projet définitif
L'axe républicain
Avant l'Exposition universelle de 1900, l'amorce d'une longue perspective est déjà marquée par le Dôme, l'Église des soldats, l'hôtel et l'esplanade des Invalides. Mais, de l'autre côté de la Seine, le regard bute de façon malheureuse sur une des façades latérales du palais des Arts et de l'Industrie. Longeant l'avenue des Champs-Élysées, cette imposante construction est, de plus, aperçue de biais.
Lors de la période de préparation des modalités du concours et, en particulier, du dessin des gabarits définissant l'emplacement précis de chaque bâtiment devant succéder à l'ancien palais, l'intention est d'inscrire ce projet dans une réalisation urbanistique plus large.
Il est ainsi prévu de prolonger l'axe des Invalides jusqu'au palais de l'Élysée et d'offrir, par là-même, une ossature à la future grande exposition.
L'axe républicain est né, tracé auquel se doivent d'obéir l'organisation et l'implantation des pavillons étrangers et à thème installés sur l'esplanade des Invalides comme l'ensemble formé par le Grand Palais, le Petit Palais devant lui faire face, de l'autre côté de l'avenue nouvelle ainsi créée, et le pont Alexandre-III lancé, en cette occasion, au-dessus du fleuve.
Cet axe, qui perdurera au-delà des festivités de 1900, constitue encore aujourd'hui la dernière réalisation d'envergure dans l'urbanisme parisien.
L'architecture
Le vaisseau principal, d'une longueur de près de 240 mètres, est constitué d'un espace imposant surmonté d'une large verrière. La voûte en berceau légèrement surbaissée des nefs nord et sud et de la nef transversale (paddock), la coupole sur pendentifs et le dôme pèsent environ 8 500 tonnes d'acier, de fer et de verre. Le poids total de métal utilisé atteint 9 057 tonnes (contre 12 000 pour la gare d'Orsay et 7 300 pour la structure de la tour Eiffel). Le sommet de cet ensemble culmine à une altitude de 45 mètres.
La colonnade de Deglane, inspirée de celle de Claude Perrault au Louvre, dissimule prudemment, comme à la gare d'Orsay édifiée par Victor Laloux pour la même exposition, la splendide innovation de la structure métallique.
Ce type de bâtiment marque l'aboutissement de l'éclectisme, propre au « style Beaux-Arts ». Le Grand Palais constitue, à lui seul, un résumé des goûts de la « Belle Époque », mais marque en même temps la fin d'une certaine conception de l'architecture où le maître d'œuvre, à la fois artiste et technicien, occupe un rôle prépondérant.
L'ouvrage est l'un des derniers jalons d'une époque antérieure à l'ère de la fée électricité. Il témoigne de ce moment des grandes structures transparentes, héritières du Crystal Palace de Londres conçu par Joseph Paxton en 1851, où l'apport en lumière naturelle est encore indispensable à tout grand rassemblement humain.
À l'origine, la construction et son fonctionnement interne sont organisés selon un axe est-ouest. La communication entre la grande nef et les autres parties du palais (salon d'honneur, aile centrale et palais d'Antin) se fait par un ample escalier de fer d'inspiration classique teintée d'Art nouveau. En 1937, le Palais de la découverte, exposition temporaire pour l'Exposition internationale, occupe l'espace du palais d'Antin (partie ouest du Grand Palais). Cette exposition attire 2 millions de visiteurs et conquiert ainsi le droit de rester dans le Grand Palais à partir de 1940. Une porte mure alors le passage entre le grand escalier d'honneur et le palais d'Antin, en rupture avec le schéma de circulation est/ouest originel. L'établissement public du Grand Palais a prévu dans son plan d'action 2008-2010 de rouvrir ce passage. Les visiteurs pourront ainsi accéder directement de la nef au palais d'Antin. De même, le salon d'honneur sera rénové et redeviendra le cœur du Grand Palais.
Les sculptures
- Les quadriges en cuivre repoussé de Georges Récipon couronnent les deux entrées et leur fronton, au nord-est et sud-est, sur l'avenue nouvelle. Ces œuvres allégoriques, s'imposant au piéton à une altitude de quarante mètres, représentent :
- du côté des Champs-Élysées : L'Immortalité devançant le Temps ;
- du côté de la Seine : L'Harmonie triomphant de la Discorde.
- Les groupes en bronze sont dus aux sculpteurs Victor Peter et Alexandre Falguière.
Les mosaïques
- Intérieurement, les pavements du hall elliptique sont en mosaïque de grès cérame. On trouve un vaste motif floral en symétrie centrale, constitué de tesselles aux couleurs peu soutenues (beige, marron et vert), mais se détachant bien sur un fond blanc. Ces mosaïques ont été réalisées par la Société Simons et Cie selon des cartons de Louis Hista.
- Les frises extérieures, situées sous le péristyle de Deglane (façade sur l'avenue Winston-Churchill), se composent d'une longue bande aux vives couleurs rehaussées d'or utilisant la technique traditionnelle de la mosaïque.
Fractionné en dix panneaux symbolisant l'art à différentes époques, cet ouvrage mesure soixante-quatorze mètres de long (273 mètre carré) et du fait de sa grande hauteur, il est souvent peu connu. Ces mosaïques ont été réalisées par Auguste-Maximilien Guilbert-Martin et René Martin selon des cartons de Louis Édouard Fournier, pour célébrer l'art au travers des civilisations connues, à l'occasion de l'Exposition universelle de 1900.
Le jeu des tesselles est animé par des opus très réguliers et souligné par des contours marqués ainsi que de subtils dégradés. On y trouve ainsi des représentations des grandes civilisations de l'Histoire telles que perçues à la fin du 19ᵉ siècle, dont l'Égypte, la Mésopotamie, la Rome d'Auguste à la Grèce du siècle de Périclès, la Renaissance italienne et française au Moyen Âge, l'Europe industrieuse à celle des arts classique et baroque.
Les civilisations plus lointaines ne sont pas oubliées, glorifiant au passage le colonialisme occidental alors à son apogée : l'Afrique méditerranéenne et subsaharienne, l'Orient et le sous-continent indien, l'Asie du sud-est et l'Indochine avec les Khmers et les temples d'Angkor, la Cochinchine et les paysages annamites autour de la ville de Hué, l'Extrême-Orient avec des représentations de la Chine mystérieuse et du Japon (alors en vogue depuis le récent engouement des peintres impressionnistes et d'écrivains pour ce pays), des évocations des deux Amériques.
La cérémonie d'inauguration
L'inauguration du Grand Palais a lieu avec tout le faste propre à la Troisième République. Une plaque de l'un des frontons d'angle porte encore, gravé dans la pierre, le témoignage de l'événement.
La cérémonie se tient le 1er mai 1900, en présence d'Émile Loubet, président de la République, de Pierre Waldeck-Rousseau, alors président du Conseil et ministre de l'Intérieur et des Cultes, de Georges Leygues, ministre de l'Instruction publique et des Beaux-Arts, d'Alexandre Millerand, ministre du Commerce, de l'Industrie, des Postes et Télécommunications et, enfin, d'Alfred Picard, commissaire général de l'Exposition universelle.
Un siècle de salons et d'expositions
Dès 1901, le Grand Palais abrite, parallèlement aux Salons artistiques, de nombreuses autres manifestations. C'est notamment pour le concours hippique, accueilli jusqu'en 1901 au palais de l'Industrie, que le Grand Palais est doté d'une nef et d'une piste sablée. D'avril 1901 à 1957, le concours hippique, avec concours d'attelages, épreuves de vitesse et sauts d'obstacles, est un moment très prisé de la vie parisienne. À partir de 1901, d'autres salons se succèdent. Ils sont majoritairement dédiés à l'innovation et la modernité : Salon de l'automobile de 1901 à 1961, Salon de l'aviation de 1909 à 1951, Salon des arts ménagers, etc.
Fermeture et renaissance
Les mesures conservatoires
L'alerte est donnée en juin 1993 après le détachement d'un élément de rivetage depuis une hauteur de près de trente-cinq mètres lors d'une exposition consacrée au design.
Le ministre de la Culture d'alors, Jacques Toubon, prend la décision de fermer « provisoirement » le lieu en novembre de la même année en raison du danger que représente la chute de nouveaux rivets sur le public.
La pose de filets accrochés sous la verrière (voir photographie ci-contre) et la convocation d'experts pour pallier cette situation ne suffisent pas pour maintenir l'ouverture au public. Seuls et après de nécessaires travaux de sécurité, les Galeries nationales et le Palais de la Découverte sont à nouveau disponibles. L'utilisation de la nef s'interrompt pendant douze années. Six années, d'abord, pendant lesquelles le ministère de la Culture et la mairie de Paris sont incapables de se mettre d'accord sur la répartition des responsabilités pour sauver le Grand Palais, qui continue donc à se dégrader. Ces tergiversations sont liées au déménagement et relogement des administrations occupant les lieux mais aussi aux montants importants nécessaires à sa restauration à son entretien. Face aux pressions d'investisseurs privés fortement intéressés par un tel emplacement en plein cœur de paris, le bâtiment fut protégé au titre des monuments historiques en 2000 à l'occasion du centenaire de l'Exposition universelle de 1900, ce qui garantit sa pérennité, puis il fut ensuite trouvé un mode de gestion permettant de sécuriser les financements nécessaires. Les travaux de restauration nécessiteront six années de travaux très progressifs.
Les premiers travaux de confortation
Des remblaiements ou injections de matériaux de natures diverses ont commencé très tôt et se sont poursuivis à différentes périodes de la vie du monument pour combler les vides entre le niveau bas de l'édifice et celui du sol continuant à s'affaisser. En 1940, les troupes d'occupation allemandes installent véhicules et matériels divers dans la nef. S'apercevant de la fragilité des lieux, elles décident d'injecter plusieurs tonnes d'un coulis de béton dans le sous-sol, stabilisant un temps le terrain et les structures, mais alourdissant l'ensemble dans sa partie méridionale. Ainsi, les désordres iront en s'accélérant jusqu'à cette fameuse année 1993.
La campagne de restauration
Les travaux se sont déroulés en deux phases :
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Première phase (novembre 2001 – août 2004) : reprise en sous-œuvre d'une partie des fondations accompagnée d'une dépose, remise en état et repose, de 2001 à 2004, des deux quadriges en cuivre repoussé et de leur armature en fer de Récipon.
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Deuxième phase (2002 jusqu'à fin 2007) : réparation des murs et autres maçonneries fissurées, de la verrière et des couvertures déformées ou vétustes avec, depuis 2005, un ravalement des façades, une restauration de la grande frise extérieure en mosaïques et une seconde et dernière campagne de consolidations des fondations.
Le budget de ce chantier a atteint 101,36 millions d'euros (dont 72,3 pour la première phase). Le financement a été assuré grâce à l'État par l'intermédiaire du ministère de la Culture.
Une nouvelle ambition à partir de 2007
L'ancien ministre de la Culture et de la Communication, Renaud Donnedieu de Vabres, a souhaité la mise en place d'une structure baptisée « établissement public du Grand Palais des Champs-Élysées », plutôt que de voir confier la gestion et la programmation du lieu à des organismes privés. Depuis janvier 2011, l'établissement public du Grand Palais des Champs-Élysées a fusionné avec la Réunion des musées nationaux.
Le 5 février 2014, Aurélie Filippetti, ministre de la Culture, annonce que l'agence LAN (en cotraitance avec Terrell, Mathieu Lehanneur, Jean-Paul Lamoureux, Casso et Associés, Base, Franck Boutté, Michel Forgue) est lauréate du dialogue compétitif lancé pour l'aménagement du Grand Palais à Paris. Le respect du monument historique ainsi que la qualité et la modernité des aménagements envisagés ont séduit le jury, présidé par Jean-Paul Cluzel, président de la Réunion des musées nationaux-Grand Palais. En janvier 2007, le Grand Palais bénéficie du statut d'établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC). Le 9 septembre 2009, Jean-Paul Cluzel succède à Yves Saint-Geours à la présidence de l'établissement public qui poursuit 4 missions :
- Achever la restauration, préserver et mettre en valeur le monument,
- Aménager et exploiter des espaces rénovés et accueillir le public dans de meilleures conditions,
- Animer et promouvoir les espaces du Grand Palais dont il assure l'exploitation et y susciter toute activité, manifestation et événement dans les domaines culturels, scientifiques et économiques, de nature à accroître le rayonnement de Paris et de la France,
- Garantir l'équilibre financier de l'établissement.
2020-2023 : une nouvelle rénovation
Le 12 février 2018, la ministre de la Culture Françoise Nyssen annonce la fermeture à venir du Grand Palais, de décembre 2020 au printemps 2023, afin de procéder à une rénovation de plus grande ampleur avant 2024, date à laquelle doivent y avoir lieu les épreuves d'escrime des Jeux olympiques d'été de 2024. Celle-ci, plusieurs fois repoussée, doit permettre outre une restauration, de réorganiser et d'augmenter ses capacités d'accueil, avec pour la nef de 11 000 personnes contre 5 600 actuellement, et les 3 700 mètre carré de balcons qui seraient de nouveaux accessibles, ainsi que de redéfinir les missions de la structure, en liaison avec le Palais de la découverte par la rue des Palais sur deux niveaux. Une terrasse doit être créée pour le public et accueillir les activités d'astronomie du Palais de la découverte. Les galeries doivent gagner en clarté par l'installation de plafonds verriers et passer des 3 000 mètre carré actuels à 3 900 mètre carré. Son coût de 466 millions d'euros doit être financé en partie par un emprunt et par le mécénat de Chanel.
Pendant la période des travaux, une structure provisoire est bâtie sur le Champ-de-Mars afin d'accueillir les grands évènements, cette structure devant également servir pour les Jeux olympiques. Ce « Grand Palais éphémère », conçu par Jean-Michel Wilmotte et géré par GL Events, est inauguré début 2021.
Fin septembre 2020, le projet initial du Grand Palais, jugé trop couteux et peu adapté aux exigences écologiques et sanitaires actuelles, est abandonné au profit d'une rénovation plus modeste et plus classique. Un nouveau projet de restauration voit alors le jour, mené par l'architecte en chef des monuments historiques François Chatillon. Le Grand Palais ferme en mars 2021, avec une réouverture prévue pour les Jeux olympiques pour la nef et les galeries et pour le printemps 2025 pour le reste des travaux.