Saint-Jean-Trolimon [sɛ̃ ʒɑ̃ tʁɔlimɔ̃] est une commune du département du Finistère, dans la région Bretagne, en France.
Histoire
Préhistoire
Le sable venu de la Baie d'Audierne, déposé par le vent, a recouvert et conservé intacts sur l'ensemble de la commune une allée couverte et d'importants sites archéologiques de l'âge du fer.
La nécropole gauloise de Kerviltré (Kerveltré) se situe dans un champ dénommé Parc-an-Menhir, en forme de monticule, où s'élevaient autrefois cinq menhirs dont quatre ont été renversés, brisés et leurs pierres en partie utilisées pour des constructions, un seul subsistant avec des traces de six cupules sur l'une de ses faces. Vingt et une urnes cinéraires furent trouvées par le propriétaire qui les brisa, espérant y trouver un trésor caché ; elles contenaient des restes d'os humains calcinés et des bracelets en bronze. Deux autres urnes trouvées en 1874 par le propriétaire contenaient des objets archéologiques qui furent vendus à vil prix à un orfèvre, mais quelques objets conservés furent sauvés par Paul du Chatellier, alors informé de ces découvertes et qui entreprit une campagne de fouille en 1875 qui permit de découvrir d'autres urnes, des squelettes et de nombreux objets archéologiques, ainsi qu'une cachette de fondeur située à proximité. Deux cents mètres plus au nord, un terrain tout couvert de monticules, au nombre d'environ 150, sont les restes des habitations.
La stèle cannelée de Kerveltré, brisée en quatre morceaux, a été réparée au ciment blanc et redressée à une centaine de mètres de son site d'origine.
L'Oppidum de Tronoën, fouillé par Paul du Chatellier (une statuette en bronze d'Osiris y fut alors découverte) ; le site fut réutilisé par la suite par les Romains : des statuettes votives indiquent qu'il existait à cet endroit un temple consacré à Vénus anadyomène.
D'autres sites préhistoriques existent sur le territoire communal : la cachette de fondeur de Rugaoudal ; la galerie souterraine de Castellou-Peron ; les stèle de Kerbonnevez (qui présente trois cupules à son sommet), de Castellou-Braz et celle située devant l'église datent de l'âge du fer et sont en leucogranite de Pont-l'Abbé.
Époque moderne
Le calvaire de Kerfilin, dit aussi de Kerfilha, ou Croas an Istilli, ou Croas an Esquidi ("Croix des Abcès), avec ses bubons répartis sur le fût qui évoquent la peste, aurait été érigé en 1505 pour remercier le ciel d'avoir mis fin à l'épidémie.
Cette commune est connue pour son rôle lors de la révolte des bonnets rouges survenue en Bretagne en 1675. C'est sur son territoire, à la chapelle de Notre-Dame de Tréminou, que fut discuté et voté l'un des codes paysans.
La chapelle Saint-Evy desservait, pour les baptêmes et les mariages seulement, l'enclave de Gorré-Beuzec, séparée du bourg par une langue de terre de Plonéour-Lanvern qui s'avance vers la mer, les enterrements se célébrant au bourg de Saint-Jean-Trolimon où se trouvait le cimetière.
Révolution française
La trève de Saint-Jean-Trolimon, qui comprenait alors 29 feux, élit deux délégués, Nicolas Le Pape et Jacques Carot, pour la représenter à l'assemblée du tiers-état de la sénéchaussée de Quimper au printemps 1789.
Saint-Jean-Trolimon est érigé en commune lors de la révolution française, sur la base d'une trève qui dépendait de la paroisse de Beuzec-Cap-Caval,. L'enclave de Gorré-Beuzec fut alors rattachée à Saint-Jean-Trolimon contre la volonté de ses habitants qui auraient souhaité être rattachés soit à Plonéour, soit à Tréguennec.
Cette ancienne trève de Beuzec était fort réduite puisqu'elle ne comportait que 14 villages. On y ajouta 12 villages de l'ancienne paroisse-mère de Beuzec, avec la chapelle de Tronoën, ainsi que la totalité de l'enclave de Saint-Evy. La nouvelle commune présentait une bien étrange figure avec un bourg adossé à sa frontière orientale, et un territoire s'étendant jusqu'à l'océan.
19ᵉ siècle
La première moitié du 19ᵉ siècle
Jérôme Loëdon, alors curé de Saint-Jean-Trolimon (après avoir été curé constitutionnel de Plomeur), aussi commissaire de la République du canton de Plomeur, organisa une fête en l'honneur des victoires de Napoléon Bonaparte, notamment la prise de Malte le 9 fructidor an VI (26 août 1798) dont le compte-rendu a été conservé : on y cria Vive la République ! Vive Bonaparte ! ; à une question demandant dans quelle partie du monde était Bonaparte, en route pour l'Expédition d'Égypte, il répondit « qu'il était là où est la victoire ». Les habitants de Trolimon érigèrent un obélisque, exécuté par leurs mains d'après un dessin de Valentin, avec l'inscription suivante en latin (son texte est dû à Jérôme Loëdon) : « Civi Bonaparte victori, negociatori pacificatori, claro et insigni, hoc gratitudinis publicœ monumentum, erexere hujus communitatis incolœ republicani, ad perpetuam viri memeoriam, anno Reipublicœ sexto, die prima mensis venti ».
Le curé de Pont-l'Abbé écrit en 1810 : « Les habitants de Saint-Jean[-Trolimon] sont privés de pasteur».
A. Marteville et P. Varin, continuateurs d'Ogée décrivent ainsi Saint-Jean-Trolimon en 1845 :
« Saint-Jean-Trolimont ; commune formée par le démembrement de Beuzec-Cap-Caval ; aujourd'hui succursale. (...). Principaux villages : Gorre-Beuzec, Kerbascol, Tréganne, Kerfilin, Kerloret. Superficie totale 1 468 hectares dont (...) terres labourables 637 ha, prés et pâturages 540 ha, bois 15 ha, landes ou incultes 230 ha (...). Moulins : 2 (à vent, de Rupape, de Kernavec). Il y a, en outre du bourg, la chapelle Saint-Ivy, qu'il ne faut pas confondre avec l'église du même nom située entre Quimper et Rosporden. Géologie : constitution granitique. On parle le breton. »
La deuxième moitié du 19ᵉ siècle
« Non seulement le territoire est (...) restreint, mais il est de valeur inégale, près du cinquième de ses 1 400 hectares étant constitué d'[un] cordon sableux littoral [et de palus], occupé au plus fort de la pression démographique [seconde moitié du 19ᵉ siècle] par des familles misérables, à mi-chemin entre l'état de mendiant et de journalier. (...) Ces ménages de journaliers,dont les enfants ont souvent trouvé à s'employer dans les ports voisins comme marins ou ouvriers dans les conserveries, constituent une des extrémités d'une hiérarchie sociale à l'autre bout de laquelle se trouvent les propriétaires paysans qui constituent, dès avant la Révolution, une minorité [aisée] non négligeable ».
Traditionnellement, chez les paysans aisés, « c'est généralement le dernier ou l'avant-dernier des enfants qui hérite du fermage ou de la propriété des parents. Les aînés partent dès après leur mariage s'ils trouvent une ferme indépendante, parfois après une période de cohabitation avec leurs parents et le cadet recueille la propriété ou le fermage après des aménagements patrimoniaux entre frères et sœurs ». Ce système de transmission du patrimoine diffère du système de dévolution en usage généralement ailleurs, y compris dans le nord du Pays bigouden, où l'exploitation agricole est généralement transmise à l'aîné des enfants.
Fin XIXe la construction de 67 écoles de hameaux a été autorisée dans le Finistère par deux décrets :
- Le décret du 25 octobre 1881 qui a délégué une subvention pour 18 écoles de hameaux sur l'arrondissement de Quimperlé ; toutes ont été bâties.
- Le décret du 14 mars 1882 qui a délégué une subvention pour 50 écoles de hameaux sur les quatre autres arrondissements du département (Brest, Châteaulin, Morlaix, Quimper) à choisir dans les communes « dont le territoire est le plus étendu et les ressources les plus restreintes » ; 49 ont été bâties dont 1 à Saint-Jean-Trolimon (Kerbascol).
20ᵉ siècle
La Première Guerre mondiale
Le monument aux morts de Saint-Jean-Trolimon porte les noms de 38 soldats et marins morts pour la France pendant la Première Guerre mondiale ; parmi eux, trois sont décédés sur le front belge (Jean Briec) est mort le 22 août 1914 dans les combats de Maissin ; Rolland Quiniou le même jour à Rossignol ; Pierre Gloaguen le 26 avril 1915 à Ypres) ; deux (Michel Souron et Laurent Maréchal) sont disparus en mer ; la plupart de autres sont décédés sur le sol français.
L'Entre-deux-guerres
Une photographie en couleurs (plaque autochrome) de Georges Chevalier, datant de mars 1920, qui se trouve au Musée Albert-Kahn de Boulogne-Billancourt, représente une "Petite ferme à la sortie du village, Saint-Jean-Trolimon".
Le 6 juin 1937, Madame Jean Garrec, mère de 19 enfants, du village de Lherapprat, reçut la Médaille de la famille française.
Le journal L'Ouest-Éclair écrit le 26 juin 1939 que « les nombreux producteurs de pois des palues de Penmarch, Plomeur, Saint-Jean et Tréguennec, dont la récolte des pois est la principale, sinon la seule, ressource, après l'année désastreuse de 1938, ne pourront guère améliorer leur sort cette année ». Le journal L'Humanité écrivait déjà en 1935 : « C'est la misère aussi chez les petits paysans que le Crédit agricole menace de saisies, menace aiguë chez les petits producteurs de pois de Plomeur, Penmarch, Saint-Jean, razziés férocement par le patronat de la conserve ».
La Seconde Guerre mondiale
Le monument aux morts de Saint-Jean-Trolimon porte les noms de 10 personnes mortes pour la France pendant la Deuxième Guerre mondiale ; parmi elles, Georges Le Faou, matelot canonnier, engagé dans les Forces navales françaises libres, disparu en mer lors du naufrage du sous-marin Surcouf (qui aurait été bombardé par erreur par un avion américain) le 18 février 1942 dans le Golfe du Mexique. Dans les années 1970, l'anthropologue Martine Segalen a consacré plusieurs travaux à cette commune.
Toponymie
La paroisse de Saint-Jean-Trolimon est notée « Treffrumon » dans des actes de 1389 et 1395, « Trolymon » en 1536, « Saint-Jean-Rumon » en 1690 et « Saint-Jean » en 1815. Les formes anciennes montrent que Trolimon est composé de deux éléments bretons : treff devenu tro, qui signifie « village », ici avec le sens de trève, et d'un nom de saint, Rumon, également honoré à Audierne et dans la Cornouailles britannique. Rumon est l'ancien saint patron de la trève avant qu'il ne soit remplacé par saint Jean (-Baptiste) dans le courant du 17ᵉ siècle,.
En breton, la commune se nomme Sant-Yann-Drolimon.
Géographie
Communes limitrophes de Saint-Jean-Trolimon
Baie d'Audierne
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Tréguennec
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Plonéour-Lanvern
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Baie d'Audierne
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Baie d'Audierne
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Plomeur
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Culture locale et patrimoine
Lieux et monuments
Le "Circuit des Trois chapelles", réhabilité en 2020, permet de découvrir à pied les trois chapelles de Saint-Vio (en Tréguennec), Tronoën et Saint-Évy ; il est accessible en période sèche (le sentier est impraticable de novembre à mai) seulement en raison de la nature marécageuse d'une partie de l'itinéraire
- Calvaire et chapelle de Tronoën
- Calvaire et chapelle de Saint-Evy, dédiés à saint Evy, qui est peut-être saint They ou David de Ménevie. Cette chapelle du 17ᵉ siècle est située près du village de Kerbascol, dans l'enclave de Gorré-Beuzec. Sur l'aile nord de l'édifice figurent un calice sculpté dans le granite et la date « 1660 ». Une fontaine se situe à l'angle de la nef et de l'aile sud.
- Église paroissiale Saint-Jean-Baptiste.
- Le calvaire de Kerfilin, érigé en 1505 ; abattue par une tempête en 1970, sa croix a été replacée à l'identique. Il doit être repeint en 2021 afin qu'il retrouve ses couleurs d'origine.
Patrimoine culturel
L'adhésion à la charte Ya d'ar brezhoneg a été votée par le Conseil municipal le 17 septembre 2004.
La "Maison des Jeux Bretons", créée en 2006, présente une quinzaine de jeux traditionnels bretons.
Personnalités liées à la commune
- Guy Trévoux (1920-2011), écrivain, résidait dans la commune.
- Pierre Flatrès (1921-1998), géographe, né dans la commune.