Trégourez [tʁeguʁɛs], située au cœur de la vallée de l'Odet, est une commune du département du Finistère, dans la région Bretagne, en France.
Histoire
Héraldique
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Trégourez blasonne au 1 d'azur, à l'agneau pascal d'argent, arboré de sable ; l'étendard chargé d'une croix de même ; au 2 d'argent au dragon ailé de gueules ; au 3 d'hermine ; au 4 d'azur semé de grenouilles d'or ; une croix gironnée d'or de huit pièces portant sur le tout. Les grenouilles rappellent la mémoire du seigneur Wicon et l'étang des grenouilles à Ponthouar. Elles rappellent aussi le paganisme des temps anciens auquel s'oppose le christianisme (l'agneau pascal). En opposition encore, les hermines de la Bretagne ducale (13ᵉ siècle et plus) et le dragon des Bretons des temps anciens, ceux qui ont fondé la paroisse. L'azur représente aussi le bleu du Pays Glazig dont Trégourez fait partie. Quant à l'agneau, il rappelle aussi le bélier de la Cornouaille.
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Préhistoire
Un tumulus d'un mètre de haut et de 35 mètres de diamètre existait dans la parcelle dite Goarem-Coz, près du hameau de Kergarédic, à deux kilomètres environ au nord-ouest du bourg.
Moyen Âge
Dès le 11ᵉ siècle, Trégourez forme une paroisse de l'évêché de Cornouaille, englobant alors les hameaux de Gulvain et Lannarnec, qui dépendent désormais de la commune d'Edern.
Deux mottes féodales sont connues à Trégourez, l'une près de Kerfaro, l'autre au lieu-dit "Coat la Motte", mais il n'en subsiste pas grand-chose, juste un bombement dans un champ pour les deux sites.
La famille de Kerguz, seigneur du dit-lieu de Kerguz, est présente aux réformations et montres de l'évêché de Cornouaille entre 1426 et 1562. Vers 1500, Yvon de Kerguz, époux de Catherine de Tréanna, offre un vitrail à la chapelle Notre-Dame-de-Ponthouar. Pierre de Kerguz fut abbé de l'abbaye sainte-Croix de Quimperlé entre 1500 et 1520. Deux nobles, Guillaume de Kerguz et Hervé du Quinquis, tous deux archers en brigandine, sont cités à la montre de l'évêché de Cornouaille de 1481 et trois (Barthélémy Le Quinquis, Louis de Kersulien, Charles Le Corre) à celle de 1562.
Les seigneuries de La Villeneuve, Crec'hanveil et Kerguiridic en Trégourez dépendaient de la baronnie de Laz, avant d'être rattachée par la suite au marquisat de La Roche-Helgomarc'h.
Époque moderne
Un aveu d'Anne de Laval concernant la seigneurie de Kergorlay date de 1543.
Un recteur de Trégourez a ainsi décrit la paroisse en 1672 : « Dans la haute vallée de l'Odet, sur le versant sur des Montagnes noires, pointe au-dessus des arbres le fin clocher de Trégourez. C'est une paroisse variée d'aspect, étalant la luxuriance de ses bocages et de ses paisibles verdures tout à la lisière des garennes désertiques et vraiment noires de la "montagne" ».
La seigneurie de Gouërec est citée en 1673 ; elle appartenait alors à Anne du Couëdic, épouse de Guillaume du Fresnay, seigneur de Barregan au Faouët. En 1723, elle est la propriété de Jean-Baptiste de Bec de Lièvre, conseiller du roi. Un manoir est construit à Gouërec en 1780 par Jean-Baptiste Mahé et Marie-Élisabeth Floch, un second manoir étant construit plus tard en 1836 par un autre Jean-Baptiste Mahé et Marie-Perrine Saouen. Un autre manoir existait à Kernaliou, propriété successivement des familles Dalayeun puis Le Poulinguen ; il fut reconstruit dans la seconde moitié du 18ᵉ siècle entre 1764 et 1776 par Yves Le Poulinguen et Corentine Mahé.
En 1732, Grégoire de Rostrenen indique dans son Dictionnaire françois celtique ou françois breton : « Il y a 13 feux dans Trégourez (...), chacun de 30 journeaux de terre, tant chaude que froide ».
Jean-Baptiste Ogée écrit en 1778 dans son Dictionnaire : « On y compte 1 000 communiants. Le territoire de Trégourez, en partie occupé par les Montagnes Noires et par les landes, dont le sol est aussi peu propre à la culture que celui des montagnes, n'offre à la vue que quelques cantons de terres labourables. On y remarquait jadis la forêt de Coatéol, qui avait trois lieues de circuit [circonférence] ».
Révolution française
La paroisse de Trégourez, qui compte alors 100 feux, est représentée par deux députés, Laurent Péron et Corentin Le Bourhis à l'assemblée du tiers-état de la sénéchaussée de Quimper chargée de la rédaction du cahier de doléances en 1789. Le 4 août 1789, des domaniers de Trégourez et Laz envahirent le château de Trévarez.
La loi du 12 septembre 1791 crée la commune de Laz, « qui aura Trégourez comme succursale », mais la commune de Trégourez devient indépendante dès 1793.
Au printemps 1796, chargés par De Bar « de rallier des mécontents du côté de Carhaix et d'étendre l'insurrection dans le Finistère, des racoleurs parcoururent les campagnes de Langolen, Coray, Trégourez, Leuhan, Laz, prenant le nom des déserteurs, des conscrits et même des hommes mariés, et les avertissant, avec des menaces, de se tenir prêts quand on viendrait les réunir ».
Le 19ᵉ siècle
Au début du 19ᵉ siècle à Trégourez, près de la moitié des habitants habitent dans des pennti et sont journaliers pour la plupart ; sur 157 exploitants agricoles, 126 disposent de moins de 50 acres et 4 propriétaires seulement ont entre 100 et 125 acres.
En 1845, A. Marteville et Pierre Varin, continuateurs de Jean-Baptiste Ogée modifient la description qu'en avait fait ce dernier : « Cette commune, bien que situé sur le versant sud des Montagnes Noires, est assez fertile, et ses terres commencent à être bien cultivées. On parle le breton ». Les auteurs citent trois moulins à eau à Trégourez à cette date, ceux de Folléou, Créac'hguen et Kerraden.
La présence de loups a provoqué de nombreux récits plus ou moins imaginaires, comme celui-ci :
« Dans le marais du Yeun Merdy (Yeur ar Maerdi), entre Laz et Trégourez, un paysan qui s'appelait Yann Guernastang s'était égaré (...) ; il s'enfonça sans le marais. Il appela au secours tout en récitant des dizaines d'Ave Maria. Un loup passa alors à côté de lui et s'approcha. L'homme lui saisit la queue en poussant un grand cri. Effrayé, le loup bondit et le sortit du marais. Sur quoi le paysan dit : "Gwelloc'h un taol fardelat ewit kant Ave Maria", c'est-à-dire "Mieux vaut un bon coup de rein que trente-six Ave Maria". »
En 1869, le chemin de grande communication n° 13 (actuelle route départementale D 51) venant de Quimper, était déjà « à l'état de viabilité » sur le territoire des communes d'Ergué-Gabéric, Briec et Langolen ; « la partie de Trégourez, d'une étendue de 4 kilomètres, à l'état de lacune, vient d'être à nouveau soumise au conseil municipal qui, enfin, en a adopté le tracé ». Les travaux eurent lieu en 1872.
Un rapport du Conseil général du Finistère indique en août 1880 que Trégourez fait partie des 27 communes de plus de 500 habitants du Finistère qui n'ont encore aucune école de filles.
Une foire importante se tenait tous les ans à Trégourez ; en 1890, le conseil municipal demande que la foire, qui se tenait jusque-là traditionnellement le 25 août, ait lieu désormais le 24 juillet.
Une épidémie de typhus exanthématique commença en novembre 1890 à Trégourez et dura près de deux ans.
Le 20ᵉ siècle
La Belle Époque
En octobre 1900, une épidémie de dysenterie se produit dans de nombreuses communes de l'arrondissement de Châteaulin dont Trégourez, y faisant une centaine de malades et provoquant 25 décès. « Cette épidémie est attribuée à la sécheresse des dernières années. Les puits et les fontaines étaient à sec, et la population a fait usage d'eaux malsaines. En outre, l'encombrement et la malpropreté des maisons sont devenus des facteurs importants de la maladie ».
En 1902, le maire de Trégourez, Quéré, conteste, contredisant les renseignements dont disposait la préfecture concernant sa commune, selon laquelle « les trois quarts des enfants étaient à même de suivre le catéchisme français en français s'est faux à peine s'il y en a six ou sept » [sic, l'orthographe a été respectée, visiblement le maire lui-même a du mal à maîtriser la langue française]. La même année, le sous-préfet de Châteaulin, dans une lettre datée du 23 décembre 1902, soutient que « les trois-quarts de la population » comprennent le français.
En 1905, le traitement du curé de Trégourez, l'abbé Picart, fut un temps supprimé par décision du ministre Jean-Bienvenu Martin pour « abus de la langue bretonne », mais, à la suite des protestations suscitées par cette décision, rétabli sur décision du Préfet du Finistère.
Déclarée d'utilité publique le 12 juillet 1908, la ligne ferroviaire à voie métrique des Chemins de fer départementaux du Finistère allant de Châteauneuf-du-Faou à Rosporden, longue de 39 km, fut mise en service le 21 décembre 1912. Elle desservait les gares de Saint-Thois-Pont-Pol, Laz, Trégourez, Guernilis, Coray, Tourc'h, Bois-Jaffray-Saint-Guénal et Elliant. Elle ferma dès 1933.
La Première Guerre mondiale
Le monument aux morts de Trégourez porte les noms de 78 soldats morts pour la France pendant la Première Guerre mondiale ; parmi eux, un (Laurent Péron) est décédé sur le front belge pendant la Course à la mer ; un (Étienne Stervinou) est décédé en Grèce alors qu'il était membre de l'Armée française d'Orient, un (Michel Rosparts) est décédé dans un hôpital suisse où il était soigné pour une maladie contractée alors qu'il était prisonnier en Allemagne ; un (Pierre Le Du) est disparu en mer ; la plupart des autres sont décédés sur le sol français ; parmi eux, deux (Yves Herdiagon et Pierre Dréau) furent décorés de la Croix de guerre et de la médaille militaire ; Jean Le Moigne fut décoré de la Croix de guerre, Maurice Mahé et Alain Tassain reçurent la médaille militaire.
L'Entre-deux-guerres
Des petits pois cultivés dans la région de Trégourez, Coray, Châteauneuf-du-Faou étaient livrés aux conserveries de Concarneau.
En 1938, le cimetière de Trégourez possédait trois beaux ifs « dont un de 2,5 mètres de circonférence à 1 mètre du sol ». Ce cimetière est également représenté sur une photographie publiée par le journal Ouest-Éclair en 1933.
La Seconde Guerre mondiale
Yves Allain, né le 21 juin 1922 à Trégourez, participa dès 1941 à la distribution de tracts et journaux clandestins au lycée Henri-IV, puis fut membre du réseau Bourgogne où il fut l'adjoint de Georges Broussine, participant à l'exfiltration de France de près de 250 aviateurs alliés et d'une centaine de civils français, organisant aussi des parachutages dans la région de Trégourez, puis s'engagea dans les Forces françaises libres en juin 1943 et reçut entre autres décorations la médaille de la Liberté avec palme d'or. À la suite d'un article de Jean-Paul Ollivier et Goulven Péron, une rue de Trégourez porte désormais son nom. Il est mort assassiné en 1966 à Rabat (Maroc) alors qu'il était le directeur local de l'ORTF dans ce pays, alors protectorat français.
Le 1er mars 1944, Bernard Corentin, de Guilven, est tué à Pont ar Guip en Trégourez par des soldats allemands lors d'un incident entre la population locale et les troupes d'occupation.
L'après-Seconde-guerre-mondiale
La foire de Trégourez
En 1960, le Comité des fêtes décide la création d'une foire agricole à Trégourez le week-end du Dimanche des Rameaux ; elle fut organisée à cette date chaque année jusqu'en 2000, attirant jusqu'à 100 000 visiteurs ; en 1990, elle fut inaugurée par Laurent Fabius, alors président de l'Assemblée nationale.
Toponymie
Attesté sous les formes Vicaria Trechoruus et Trechorus au 11ᵉ siècle, Tregoures en 1395 et 1400 et Tregourez en 1426.
Le nom Trégourez proviendrait du breton Tre (en français « au-delà ») et le suffixe gourez et serait une déformation de Coray, le nom complet signifiant donc « au-delà de Coray », séparé de Coray par l'Odet, mais cela reste très incertain. Selon une autre explication, finalement assez voisine et aussi fantaisiste que la précédente, le nom Dreo-Gouere signifierait « La trève du bas » et C'horre, à l'origine du nom "Coray", « la trève du haut ».
La paroisse serait issue du démembrement de la paroisse de l'Armorique primitive de Laz.
Tregourez, en breton, sans accent.
Monuments
- L'église paroissiale Saint-Idunet, dédiée à saint Idunet, date du 15ᵉ siècle ; elle a été rénovée aux 16ᵉ et 17ᵉ siècles ; le porche sud dont le toit est en forme de carène renversée et le porche de la sacristie datent du 17ᵉ siècle.
- La chapelle Notre-Dame de Ponthouar date du 15ᵉ siècle et du 16ᵉ siècle.
- Manoir du Gouërec des 18ᵉ et 19ᵉ siècles.