Tréogat [tʁeɔɡat] est une commune française, située dans le département du Finistère en région Bretagne.
Histoire
Préhistoire
En 1886, Paul du Chatellier trouva, sous un tumulus qu'on venait de raser sur les terres du château de Men-Guen (Minven), une dalle dont la face supérieure était couverte de sculptures formant des cupules, les unes oblongues, les autres rondes, de dimensions différentes, reliées par des rigoles formant un dessin très varié ; la pierre avait un trou central.
Antiquité
Une voie romaine partait de Pont-l'Abbé et allait jusqu'à la Pointe du Raz en passant par Plonéour, Tréogat, Pouldreuzic et Plozévet.
Moyen Âge
La famille de Minven était « seigneur du dit-lieu » lors des réformations et montres de l'évêché de Cornouaille entre 1442 et 1536. Par la suite, la famille a été fondue (par le mariage d'une héritière avec un homme de cette famille) en 1560 dans la famille de Lanros, puis en 1598 par le mariage de Marie de Lanros de la Boyne avec Charles du Boisguéhenneuc (né le 15 avril 1566 à Caro dans l'actuel Morbihan, et décédé le 20 décembre 1617 à Tréogat), dans celle de Boisguéhenneuc.
Époque moderne
Entre 1592 et 1599, pendant les Guerres de la Ligue, comme de nombreuses autres paroisses de l'évêché de Cornouaille, Tréogat fut victime des « continuelles guerres, courses, demeure et ravaige de l'ung et de l'autre party, tant estrangers, Angloys, Espagnolz, Suisses, Lansquenetz, qu autres, ont faicts esdictes paroesses et en genneral par tout ledict evesché de Cornouaille ».
Dans le tome 2 de son roman historique Aliénor, prieure de Lok-Maria (époque de la Ligue, 1594), règne de Henri IV, Pitre-Chevalier décrit l'affreuse misère des habitants de Tréogat, Peumerit et Pluguffan pendant les Guerres de la Ligue : « elle vit de pauvres pen-ty, décharnés par la souffrance et la faim, couverts de haillons moins effrayants que leurs figures sortir comme des fantômes des taillis et des clos de genêts, se réunir en troupes à l'ombredes talus et des grands chênes, mettre le feu aux ajoncs de la lande pour y jeter un reste de semence, s'attelr comme des bêtes de somme à la charrue commune, ou même s'accroupir sur le sol et creuser la terre avec leurs ongles, afin d'avoir quelques grains de blé l'année suivante, si les brigands n'en faisaient pas manger l'herbe par leurs chevaux !.. » ; il décrit ensuite la peur des loups devenus très nombreux.
Le père Julien Maunoir prêcha des missions à Tréogat en 1656 et en 1676.
La famille du Boisguéhenneuc est chevalier et seigneur de Minven pendant toute l'époque moderne ; parmi ses membres connus Alexandre François du Boisguéhenneuc, né le 22 décembre 1675 à Tréogat, écuyer et seigneur de Minven et autres lieux, décédé le 3 mai 1725 à Tréogat et son fils Charles du Boisguéhenneuc, né le 28 août 1703 à Tréogat, décédé vers 1770 et père de Charles Nicolas du Boisguéhenneuc.
Le 11 août 1723, selon les archives de l'Amirauté de Quimper, le Petit-Achille, un bateau de 25 tonneaux de Boulogne, vint se briser lors d'une tempête sur la côte de Tréogat. Le 30 octobre 1743 le capitaine Michel Laot fit échouer volontairement son bateau, le Saint-Jean-Baptiste, d'Argenton, près de Tréogat, pour éviter d'être pris par un corsaire anglais, et qu'il n'a aucune espérance de pouvoir le faire relever.
En 1759, une ordonnance de Louis XV ordonne à la paroisse de Tréogat de fournir 6 hommes et de payer 39 livres pour « la dépense annuelle de la garde-côte de Bretagne ».
Jean-Baptiste Ogée décrit ainsi Tréogat en 1778 :
« Tréogan [en fait Tréogat], à 4 lieues à l'ouest-sud-ouest de Quimper, son évêché et son ressort, à 43 lieues de Rennes et à deux lieues de Pont-l'Abbé, sa subdélégation. On y compte 450 communiants, la cure est à l'alternative. Le territoire, qui est borné par la mer, est très bien cultivé et fertile en grains de toutes espèces. »
Révolution française
La paroisse de Tréogat, qui comprenait alors 45 feux, élit deux délégués, Noël Le Goff et Christophe Le Berre, pour la représenter à l'assemblée du tiers-état de la sénéchaussée de Quimper au printemps 1789.
La loi du 12 septembre 1791 « relative à la circonscription des paroisses du district de Pont-Croix » donne à la paroisse de Peumerit comme succursale Tréogat.
Charles Nicolas Du Boisguéhenneuc, chevalier de Minven, né le 13 mars 1744 dans la paroisse Saint-Julien à Quimper, chevalier seigneur de La Forêt en Loctudy, de Trémébrit et autres lieux, commissaire de la noblesse aux États de Bretagne émigra en Allemagne pendant la Révolution française et ses biens, notamment son château du Minven, saisis comme biens nationaux, furent acquis par son régisseur Michel Caoudal grâce à de l'argent qui lui aurait été fourni par Charles Nicolas Du Boisguéhenneuc ; ce dernier récupéra le 15 janvier 1803 ceux qui n'avaient pas encore été vendus, mais pas ceux acquis par Michel Caoudal qui aurait "oublié" de les rendre par la suite.
Le 17 juillet 1797, la frégate Calliope, qui en compagnie des corvettes Diligente et Pélagie, escortait un convoi de navires de commerce fut attaquée par trois frégates et une corvette anglaises, renforcés peu après par d'autres navires de guerre anglais, les frégates Pomone et Astrea, près d'Audierne, et atteinte par leurs boulets. « Le capitaine Deshayes prit le parti d'aller s'embosser aussi près que possible de la côte de Tréogat, commune de Plovant [Plovan] ; mais l'embossure ayant cassé, la corvette évita, le beaupré au large. (...) La mer était houleuse, l'ancre de la Calliope ne tint pas ; la corvette cula et talonna avec une force telle que son grand mât se brisa un peu au-dessus de la hune. Les autres mâts furent coupés, et les canons, moins six, furent jetés à la mer. (...) L'équipage descendit à terre, et [la Calliope] fut livrée aux flammes ».
Le 19ᵉ siècle
Le 19 juillet 1817, le commissaire des classes du quartier de Quimper s'élève contre les pillages affreux qui s'exercent, sur les navires naufragés, par les habitants des communes littorales et notamment « ceux qui se sont exercés sur le naufrage du navire suédois la Jeanne Caroline, survenu le 5 mars 1916 à la côte de Tréogat, et sur celui du navire français la Minerve, arrivé le 5 juin 1817 à la côte de Plovan ».
A. Marteville et P. Varin décrivent ainsi Tréogat en 1845 :
« Tréogat, commune formée par l'ancienne paroisse du même nom. (..) Principaux villages : Kerganet Quélern, Lebragnol, Kerguénal, Penhors, Tréonvel, Mouguéroux. Maison importante : manoir de Minven. Superficie totale : 952 ha dont (...) terres labourables 268 ha, prés et pâtures 48 ha, bois 32 ha, vergers et jardins 9 ha, landes et incultes 503 ha, étangs et canaux 57 ha (...). Moulin à eau de Kervahu. Étangs de Kerlan et Traonven [Trunvel]. Cette commune n'a pas de succursale, le desservant de Plovan fait le binage [dessert les deux paroisses]. Géologie : constitution granitique. On parle le breton »
Un rapport de l'inspecteur d'académie signale en 1880 que la commune de Tréogat fait partie des six communes du département du Finistère « encore dépourvues de tout moyen d'instruction ». L'école communale ouvrit en 1887.
Les registres communaux de Tréogat font mention d'un jeu ou sport dénommé "tir à la rondache" ; peut-être s'agit-il tout simplement de la galoche, toujours pratiquée dans le Pays bigouden.
Le 20ᵉ siècle
La Belle Époque
Le journal Le Matin indique dans son n° du 15 mars 1906 qu'« il a été impossible de procéder aux inventaires à Plovan, à Plomeur, à Tréogat et à Plozévet, des groupes compacts de femmes entourant les églises ».
Un service de téléphone public ouvre à Tréogat le 16 novembre 1910.
Le 13 janvier 1914, les biens ayant appartenu à la fabrique de l'église de Tréogat, qui étaient placés sous séquestre, sont attribués à la commune de Tréogat.
La Première Guerre mondiale
Le monument aux morts de Tréogat porte les noms de 32 soldats et marins morts pour la France pendant la Première Guerre mondiale : parmi eux, deux (Pierre Bonizec et Yves Quiniou) sont morts le même jour le même jour le 22 août 1914 lors des combats de Maissin en Belgique ; un (Joël Guilly) est mort en Serbie en 1916 dans le cadre de l'expédition de Salonique ; la plupart des autres sont décédés sur le sol français.
L'Entre-deux-guerres
Une école des filles est construite en 1924 à Tréogat.
La ligne ferroviaire à voie métrique surnommée « train carottes », exploitée initialement par les Chemins de fer armoricains, fut inaugurée le 1er octobre 1912 et ferma le 30 juin 1935, ne fonctionnant donc que 33 ans à peine. La voie ferrée partait de Pont-l'Abbé et desservait les gares de Plonéour-Lanvern, Tréogat, Pouldreuzic, Plozévet, Plouhinec, Pont-Croix, pour aboutir à Audierne ; la ligne desservait aussi des arrêts facultatifs supplémentaires comme celui de Plovan. « C'était un train mixte de marchandises et de voyageurs, qui a eu un impact important sur la vie économique et sociale en pays bigouden et dans le cap Sizun » a écrit l'historien Serge Duigou.
La Seconde Guerre mondiale
Le monument aux morts de Tréogat porte les noms de six personnes mortes pour la France pendant la Seconde Guerre mondiale : parmi elles, Corentin Plouzennec, marin second maître mécanicien, disparu en mer le 24 juillet 1940 lors du naufrage en Manche du paquebot Meknès torpillé par les Allemands ; Daniel Toullec, mort le 20 mai 1940 à Asfeld (Aisne), lors de la Débâcle ; Michel Autret, mort le 7 février 1945 à Vienne (Autriche).
Les Allemands construisirent à partir de novembre 1943 une série de blockhaus au lieu-dit Kéryéré, sur une colline située à 800 mètre de la mer, mais qui permettait de surveiller toute la baie d'Audierne depuis la Pointe du Raz jusqu'à la Pointe de Penmarc'h ; ceux-ci furent construits à partir de béton et de galets provenant du cordon de galets voisins concassés dans l'usine de Tréguennec.
Yves Riou, né le 20 janvier 1889 à Tréogat, instituteur à Pouldergat, fut arrêté dans sa classe le 16 décembre 1942 en raison de ses sentiments anti-nazis ; déporté, il est mort le 8 mai 1944 au camp de concentration d'Oranienbourg-Sachsenhausen ; son nom a été donné à l'école publique de Pouldergat.
Les « Marcassins » de Tréogat
La première équipe de football de Tréogat est créée en 1929 par Alain Hascoët, boulanger ; elle cesse ses activités pendant la Seconde Guerre mondiale.
Le club des « Marcassins Sportifs de Tréogat » est fondé en 1947 par le même Alain Hascoët. Le nom choisi pour le club s'explique probablement par le grand nombre de chasseurs et de sangliers dans la commune.
Toponymie
Attestée sous les formes Trefvozgat en 1348, Trevosgat en 1405, Treozgat en 1535 et 1574, Treogat en 1599.
Treogad en breton.
Ce toponyme est formé sur Trev dont le sens primitif signifait une division territoriale (trève), et l'antroponyme Bozkad ; une autre hypothèse, émise par Joseph Loth évoque saint Gouescat (il existe une chapelle de Saint-Treouescat à Guipronvel), connu aussi sous les noms de saint Escat, Ergat ou Boscat, et à l'origine aussi des noms des paroisses de Pouldergat, Tréouergat et Louargat.
Bozkad se retrouve comme prénom et est usité jusqu'au 18ᵉ siècle. Bozkad signifierait « Victoire au combat » et provient de Bud, la victoire et Kad le combat.
Lieux et monuments
- Église Saint-Boscat, 14ᵉ siècle, dédiée à saint Boscat.
- Croix de Kerguenol, années 1500.
- Manoir de Minven, 16ᵉ siècle. Ce manoir dont le nom proviendrait de Mein Vein (« Pierre blanche » en breton), en raison des affleurements de quartz nombreux dans les environs, possède « une porte en anse de panier encadrés par deux pinacles, à nids d'abeille à la base, et torsadés au-dessus ». À l'intérieur, on peut voir un escalier rampe-sur-rampe (exemple précoce), côté façade postérieure.
- Lavoir de Ty-Poul.